15. Naissance, mais pas que...

L'avion se posa en douceur près du camp humanitaire.
- Eh ben dis-donc ! T'en as fait des progrès Esam !
- Tais-toi, homme pâle. Il n'y a que pour toi que je faire des vagues dans l'air. Je sais très bien conduire. Mais comme vous être trois dans mon bolide, je faire attention. Je voulais te faire peur, quand tu es tout seul.
- Ben ça à réussi ! Ça va Nola ? Toujours entière ?
- Oui, oui, ça va, dit-elle d'une voix faible.
Je vis que le voyage ne lui avait pas fait du bien et qu'elle avait du mal à tenir debout. Je la pris dans mes bras, remercia Esam, et partit vers ma tente.
Je la déposai en douceur sur le matelas et, voyant qu'elle avait besoin de se reposer, je partis parler avec le chef de la mission.

- Bonjour, Cyrille ! Alors quoi de neuf ici ?
- Salut, vieux. Je vais bien merci de t'en soucier.
- Comment tu vas ?
- Après ton départ, on a gelé la mission. Tout le monde à eu deux gros mois de vacances. De toute manière, il n'y avait rien à faire en cette saison, tout était calme. Je savais que tu reviendrai avec nous donc je t'ai inscrit pour cette nouvelle mission. C'est la même que la précédente sauf qu'elle dure plus longtemps. Elle a commencé il y a deux jours. Donc t'es pas trop en retard.
- Elle dure combien de temps ?
- Deux ans et demi. Et j'aimerais bien que cette fois-ci tu ne parte pas en plein milieu. On a besoin de toi, Alex. Et de Nola aussi. Tout ce qu'elle peut nous apporter nous le voulons. Qu'elle fasse ce qu'elle veut mais qu'elle aide et on la garde avec nous.
- Ben Nola justement...
- Quoi ?
- Elle est enceinte.
- Toutes mes félicitations.
- Mais, ça veut dire que...
- Qu'elle ne pourra pas nous aider pendant en petit bout de temps. Je comprends. C'est pas grave.
- Merci.
Il me sourit et retourna à ces occupations.

De mon côté, je fis le tour du camp pour saluer mes collègues et pour leur demander des nouvelles.
Tout le monde allait plus ou moins bien. Les deux mois de vacances avaient fait du bien à tout le monde. Évidemment.

Dès le lendemain nous partirons dans un village pour voir les dégâts de l'orage qui avait eu lieu la semaine dernière.

- Tu nous as manqué, tu sais, dit Marc.
- Ouais, Cyrille était exécrable sans ton humour et sans quelqu'un qui l'empêche de prendre la grosse tête ! renchérit Manon.
- Sérieux ?
- Attends, j'vous dis pas comment il était avec moi, intervint Laure, qui était en train de déballer des cartons.
- Je pensais pas que j'étais indispensable à ce point...
- Tu n'es pas indispensable ici ! Ou plutôt... tout le monde est indispensable dans l'équipe. Il suffit qu'un seul rouage manque à la machine, et tout se casse la figure. Vous pouvez m'aider à ouvrir la cargaison ? demanda Laure.

Je pris un cutter et tranchai le carton qui protégeait les médicaments.
- On va dans quel village demain ?
- Je sais pas trop. Un village pommé près de la frontière avec le Botswana. Il faut bien sûr qu'on évalue et qu'on répare les dégâts de l'orage énorme qui a eu lieu récemment dans la région, mais il faut surtout qu'on soigne les personnes atteintes du VIH. Tu sais qu'en Namibie plus de 20% des adultes ont le sida...
Nous continuâmes à parler en sortant et en rangeant nos provisions, jusqu'à ce que :
- C'est vrai que Nola et toi allez être parents ?
- Ben... ouais.
- Et... vous allez vous marier ?
- Sûrement...
- Et tu compte faire ça comment ?
- Faire quoi ?
- Bah, lui demander te t'épouser ! Avec de la musique des fleurs et une bague ? C'est romantique non ?
A ce moment Nola sortit de la tente. La lumière l'aveugla au début et elle mit une main devant ses yeux pour les protéger. Elle me vit, me sourit et commença à venir vers nous.
- Hé Nola ! lui criai-je.
Elle fit un mouvement de la tête voulant dire "Quoi ?" ou "Qu'est ce qui a encore ?" et je continuai :
- Tu veux te marier avec moi ? hurlai-je à travers le camp.
Elle hocha les épaules comme pour répondre "Si tu veux, j'en ai rien à cirer" mais dans son sourire je fis que ce n'était qu'une apparence. Je lui rendis son sourire et retournai à mes cartons.
- Alors, c'était romantique ?
- Absolument pas. Mais tu t'en doutais non ?
- Ben non.
- Quoi ? T'étais sérieux ?!
- Bien sûr... pourquoi ?
- Tu me fais marcher hein ?
- Absolument pas, souris-je.

Je sortai de la tente et me mis en quête d'Alex.
- Hé Nola ? me cria-t-il de l'autre bout du camp.
Je tournai la tête vers lui et le fixai.
- Tu veux te marier avec moi ?
J'haussais les épaules. Dans le registre romantique, c'était plutôt mal parti.
Je m'approchais malgré tout d'eux -Alex, Manon, Marc et Laure, en train de déballer les provisions-.
Je me mis au travail, m'intégrant silencieusement à leur équipe.
- Au fait, félicitations, Nola, me lança Manon.
- Pour quoi ?
- Ben ... pour le bébé.
Alex me sourit, l'air d'être l'homme le plus heureux au monde, et cela me réchauffa le coeur.
Nous passâmes le restant de l'après-midi à empaquater -pour l'expédition du lendemain-, et nous finîmes seulement au crépuscule.
Tradition qui ne se perdait pas, nous nous installâmes autour du feu de camp pour le repas du soir.
- On a tout pour demain ? demanda Cyrille.
Chacun hocha la tête, et il nous fit un petit topo.
- J'espère que vous êtes tous motivés, parce que on va bosser pendant pas mal de temps. Vos prochaines vacances ne sont programmées au minimum que dans dix mois, et la région a subi beaucoup de dégâts à cause de ce putain d'orage. Demain, on commence par le nord. On va silloner pendant ... je pense une bonne semaine, puis on reviendra recharger et on repartira. Ce sera le programme le temps qu'on parcoure la région.
- Et après ?
- Après ? On change de région, et on fonctionne comme ça pendant deux ans et demi. J'ai besoin de votre motivation. S'il y a quelqu'un qui n'est pas prêt, il vaut mieux qu'il ne vienne pas. Il sera un poids pour l'équipe, et je refuse que ça arrive.
Le regard de Cyrille s'attarda sur moi quelques secondes, et je me sentis toute particulièrement visée par ses paroles.
Mais avais-je une autre alternative ?
J'en étais au début de ma grossesse, je me portais comme un charme, et j'étais encore apte à travailler. Dans deux mois, le repos et la sédentarité seraient impératifs, mais pour l'instant j'étais encore utile.
Cyrille rajouta encore quelques conseils, puis nous ordonna d'aller dormir.

Ma tête posée sur le torse d'Alex, son bras entourant mes épaules, je le sentais proche du sommeil. Avant que celui-ci ne l'emporte, je lui demandai :
- C'était une impression ou Cyrille me déconseille de partir ?
- Il ne veut pas qu'on perde le bébé. C'est tout.
- Et toi, tu en penses quoi ?
- Comment tu te sens ?
- En pleine forme.
- Si tu te sens bien, alors tu peux venir. Mais quand tu auras attaqué ton sixième mois, mieux vaudrait que tu arrêtes de crapahuter.
- Je sais.
- Ne t'inquiète pas, tout ira bien.
- Je sais.
- Il faudrait dormir.
- Je sais.
- Je sais que tu sais !

Une heure plus tard, alors que le souffle régulier d'Alex caressait mon cou, je ne dormais toujours pas.
J'étais anxieuse et tendue.
Peut être Cyrille avait raison. Peut être que ce bébé serait ma priorité et que je me soucierais de lui sans plus penser à la mission. C'était justifié, mais l'équipe n'avait peut être pas besoin d'un membre inutile qui prendrait de la place et de la nourriture comptée.
Peut être ...
Baser ma vie sur des doutes et des incertitudes n'était pas pour me plaire. Surtout avec un bout de chou dans les bras.

Je me levais le plus silencieusement possible dans l'espace restreint de la tente, et sortai. J'avais besoin de me dégourdir les jambes et de me changer les idées.
Je constatais que je n'étais pas la seule à souffrir d'insomnie. Cyrille fixait le feu, perdu dans ses pensées. Je m'assis à côté de lui.
- Faites ce que je dis mais pas ce que je fais, n'est-ce pas ? lui dis-je.
- C'est dur de choisir entre un enfant et l'Afrique, au point de t'empêcher de dormir ? plaisanta-t-il.
- Perspicace, monsieur le chef ...
Il ricana.
- Arrête de te dévaloriser. Tu es un bon chef.
- Merci.
- Et toi, qu'est-ce qui t'empêche de dormir ?
- C'est ma dernière mission.
- Pardon ?
- Je peux te confier quelque chose que tu garderas pour toi ? Pas même à Alex ?
- C'est grave à ce point ?
- J'ai un cancer. Il ne me reste plus beaucoup de temps.
Je levais les yeux vers les étoiles. Pourquoi les meilleures personnes doivent-elles partir en premier ?

Ne trouvant aucun mot de réconfort, je le pris dans mes bras.
Que pouvais-je faire d'autre ?

Le soleil se levai doucement sur le camp déjà bien réveillé.

- Quand tu seras trop enceinte pour travailler... commençai-je.
- On est jamais trop enceinte.

Je mis un carton dans l'avion d'Esam.

- Oui, mais... enfin... bref. Tu logeras où ?
- Ben ici. Nan ?

Je sautai dans le coucou tout en disant à Nola :

- Tu penses que ce sera bien ?
- Comment ça ?

Je lui tendis la main.

- Tu seras pas trop... nostalgique de ne pas travailler ? Et puis on peut te trouver un endroit pépère, plus beau.
- Genre ?

Elle monta dans l'appareil.

- Genre dans un village avec des gens du pays.
- Mais qui voudrait de moi ? Une blanche ?

Esam mit le moteur en marche et cria, pour couvrir le bruit :

- Moi ! Enfin... nous !
- Et puis, tu n'es plus si blanche que ça, entre le bronzage et la poussière...

Elle me lança un regard perplexe et j'essayai de lui expliquer.

- J'y ai réfléchit et...
- Tu sais réfléchir toi ?

L'avion quitta le bitume.

- Oui. Ça t'étonne ?
- Vas-y. Continues. T'as réfléchit et ... ?

Nous passâmes au dessus d'un baobab solitaire.

- J'me suis dit que ça te plairais sûrement plus de vivre dans une hutte avec le peuple qu'ici.
- Pourquoi ?

Un nuage nous cacha un instant le soleil et nous pûmes admiré un instant la beauté du paysage sans être aveuglés.

- Parce que je trouve que ça te ressemble plus. C'est moins...
- Trivial ? Plus original ?

La savane s'étendait à perte de vue,

- Moui. Et surtout plus..
- Intéressant ?

Avec ses arbres,

- Oui voila !
- Tu crois ?

Ses animaux,

- J'en suis sûr. Et puis le village d'Esam t'acceptera certainement.
- Tu penses que c'est le seul ?

Son herbe brulée,

- Bien sûr que non ! Mais comme ça tu connaîtrai déjà quelqu'un et il pourra t'apprendre sa langue.
- Un interprète...

Son soleil de plomb,

- Non ! cria le pilote. Un ami !

Ses rares cours d'eau...

- Un ami ? demanda Nola. Dans ce cas...
- Pourquoi pas ? continuai-je.

Oui, la savane.

- Oui, sourit-elle. Pourquoi pas...
- Mais il te faudra faire le rituel, glissa Esam.

Cette savane que j'aimais tellement et qui était si belle...

- Pas de problème, affirma ma compagne. En quoi consiste-il ?
- Il te faut couvrir de ton corps du bave du crapaud tout en mangeant un arbre tout seul et en chantant dans le feu un chanson mortuaire...

Et si traître.

- QUOI ? hurla Nola.
- Non, non, rigola notre ami. Je plaisante.

Car comment un si bel endroit peu être aussi si meurtrier ?

J'ouvrais avec appréhension la porte de ma petite chambre.Mes chaussures couinèrent sur le lino, et j'eus l'impression d'être une prisonnière cherchant à s'évader. Dans un certain sens, je l'étais.
Je parcourais les couloirs déserts de l'hôpital, une main posée sur mon ventre rond. Fort heureusement, j'arriverai bientôt à terme, et je pourrai alors enfin quitter cet hôpital où l'ennui suintait des murs rose pâle.
J'arrivai sans encombre à la sortie, que je passai en me délectant de l'air légèrement adouci de la soirée. Le soleil s'était déjà couché, et les étoiles brillaient faiblement dans le ciel.
Je partais vers la ville, désireuse de me chercher un sandwich non diététique. Je ne connaissais évidemment pas la ville - je l'avais seulement parcourue en voiture durant le trajet qui m'avait conduite à l'hôpital la semaine précédente.-
Le village d'Esam me manquait. J'y avais passé une grande partie de ma grossesse, et les habitants avaient été très accueillants. Je m'y étais sentie chez moi.
Mais l'hôpital était une vraie calamité. Et je n'avais plus de nouvelles d'Alex depuis qu'il m'avait emmenée dans ma prison.
Douée comme je l'étais, je me perdis et finis dans une ruelle sombre. Je m'empressais de retourner vers le centre, là où les lampadaires éclaraient le sol, mais un soupir attira mon attention.
Un homme était allongé sur le sol, avec un carton pour matelas, et il s'agitait. Son bras était barré d'une plaie suintante et son front était couvert de sueur. Je m'approchais et m'accroupis devant lui.
- Vous avez besoin d'aide ? essayai-je en anglais.
Il me regarda, interloqué, plusieurs secondes, puis rebaissa les yeux.
- Vous voulez que j'appelle une ambulance ?
- Je vais bien. Foutez le camp.
Sa voix était quasiment inaudible, et il sembla exténué après avoir fourni l'effort de parler.
- Je ne crois pas. Je vais essayer de vous relever, d'accord ? Après, on trouvera un médecin.
- NON !
- Monsieur, vous êtes mal en point. Vous devez être examiné ...
Il se releva aussi facilement que s'il n'était pas malade, me bouscula, et s'enfuit. Je perdis l'équilibre, et tombais en arrière.
- Et merde ...
Je compris alors que je venais perdre les eaux. Je passai ma main sur ma tête, et la retrouvais couverte de sang. J'avais dû m'ouvrir en tombant.
J'inspirais pronfondément et essayai de me relever. Peine perdue.
Les premières douleurs m'arrachèrent un gémissement pitoyable et j'attrapai tant bien que mal mon portable. Plus de batteries.
Une sueur glacée recouvrit mon corps. Non ! Je ne pouvais pas accoucher ici, seule !
M'accrochant à ma simple volonté, je réussis à me mettre sur mes jambes et tout en m'appuyant contre le mur, j'avancais en vacillant vers la rue principale, en priant pour qu'elle ne soit pas déserte.
Une femme était adossée à son son taxi, en train de fumer. Elle me vit et me regarda avec intérêt, jusqu'à comprendre que j'avais besoin d'aide.
- Ca va ? me héla-t-elle de l'autre bout de la rue.
- Vous pouvez me conduire à l'hôpital ?
Elle daigna enfin s'approcher.
- Vous allez accoucher ?
- Oui. On pourrait y aller ?
Elle me soutint et m'aida à m'asseoir. Elle prit place sur le siège avant et démarra en trombe. Je ne pus retenir un cri de douleur.
- Ne vous en faites pas ! On y est bientôt, c'est pas loin !
Elle était tout aussi paniquée que moi.
Après un trajet interminable, nous arrivâmes enfin devant l'hôpital.
- Restez-là, je vais chercher un médecin !
Je la vis s'éloigner en courant, et appuyai ma tête contre la vitre. Je serrais les poings pour ne pas crier, et mes jointures blanchirent sous la pression.
Deux médecins arrivèrent enfin derrière ma sauveuse, poussant un brancard.
Le premier ouvrit la porte et approcha le brancard.
- Bonsoir, mademoiselle. Je suis le docteur Snickers. Comment vous sentez-vous ?
- Mal ...
- Ne vous en faites pas, tout va bien se passer. Il va falloir qu'on vous dépose sur le brancard.
- Xavier, je crois que c'est trop tard. Le bébé arrive.
- Vous en êtes à combien de mois ?
- Sept mois et demi.
- Bon, ça va. Ecoutez, mademoiselle. Est-ce que vous vous sentez prête à accoucher sans anesthésie ?
- Non !
- C'est trop tard pourla péri-durale ! Xavier, faut qu'on fasse une césarienne !
- Qu'est-ce qui se passe ? demandai-je, paniquée.
- Calmez-vous. Le bébé ne peut pas naître par les voies naturelles ! Allez, on la met sur le brancard !
Les deux médecins me déplacèrent, m'allongèrent et poussèrent quasiment en courant le brancard vers l'hôpital. Alex et moi avions heureusement choisi le plus moderne.
Ils m'emmenèrent dans l'ascenseur.
- On monte à l'étage, on a tout le matériel là-haut.
A mi-chemin, il y eut une bruit de blocage, et l'asceuseur s'arrêta, les lumières s'éteignèrent.
- MERDE !
Je le vis abattre son poing sur le bouton de dépannage.
- Xavier, de la lumière !
Je le vis sortir une petite lampe de poche.
- Mademoiselle, il va falloir qu'on pratique la césarienne ici.
- D'accord.
- Euh ... sans anesthésie ...
- Allez-y ! criai-je.
La douleur était insupportable, et je fermai les yeux.
Il sortit des ciseaux et découpa mon T-shirt afin de dégager mon ventre.
- J'y vais.
Je sentis la pointe du scalpel s'enfoncer dans mon bas-ventre.
- Vous avez un portable ? demandai-je faiblement.
- Je dois prévenir quelqu'un ?
- Essayez, tout au moins.
Je lui dictais le numéro d'Alex.
Par un quelconque coup de chance, il décrocha.
- Votre amie est en train d'accoucher ... Oui ! ... Non, on est bloqués dans un ascenseur ... On pratique une césarienne, on a plus le temps ... Oui ... On ne peut pas se prononcer pour l'instant ... D'accord ... Aurevoir.
Il s'approcha de moi.
- Votre ami et en route. Il vous dit qu'il sera là le plus vite possible, et qu'il vous aime.

Je m'étirai douloureusement en jetant un regard vers le ciel étoilé.

- Alex ?! Ne me dis pas que t'es fatigué, me lança ironiquement un de mes collègues. Allez, courage mec, on a bientôt fini...
- Tu parles ! soupirai-je.

Voila un mois que nous étions partis dans ce village abandonné, pour distribuer le bien autour de nous. Et tout ce passait bien, la routine, quand voila que, il y a quatre jours, une épidémie c'était répandue. De quoi ? On ne le savait pas encore. Mais les membres de l'équipe humanitaire avait l'air vaccinés contre ce fléau inconnu. Et tant mieux pour nous, car il nous fallait toutes nos troupes pour porter secours à ces habitants, cloués au sol par la fièvre et les maux d'estomacs.
Cela faisait donc plusieurs jours que nous n'avions pas dormi et nos corps commençaient à en ressentir le contre-coup. Physiquement, j'étais comme mort.
Mentalement aussi d'ailleurs. Car dans ce village de malheur, le portable ne passait pas tout le temps. Une heure par jour, à trois heures. Du matin. Cela donc faisait trente jours que je n'avais pas de nouvelles de Nola car je ne voulait pas perturber son sommeil.
Mais je savais que je n'avais pas de raison de m'en faire, je serais là pour l'accouchement comme nous repartirons la semaine prochaine.
Je n'avais pas de raison de m'en faire.
Tout se passait bien.

Mon portable sonna.
Quel était le con qui pouvait m'appeler à trois heures de la nuit. J'étais sensé dormir.
- Oh putain il est déjà trois heures, râla Laure.
La sonnerie retentissait toujours, et j'essayais de reconnaître le numéro qui s'affichait. En vain.
- Bon merde Alex ! Tu décroche ou quoi ? Elle nous fait chier ta putain de sonnerie !
- C'est bon mec, on est tous à bout, pas besoin de s'énerver, dis-je en décrochant.

- Oui ?
- Monsieur... Alex ?
- Oui c'est moi. Qui êtes-vous ?
- Je suis médecin. Connaissez-vous une jeune femme qui s'appelle Nola ?
- Oui pourquoi ? m'inquiétai-je.
- Votre amie est en train d'accoucher... Dans l'ascenseur.
- Elle peut rien faire comme les autres hein.... Elle va bien ?
- Oui.
Un hurlement, un de ses hurlements retentit dans le téléphone. J'entendis une voix dire :
- Respirez bien madame. Oh putain, pourquoi on a pas d'anesthésie ?
- Vous êtes sûr qu'elle va bien ?
- ...
- Qu'est ce qui se passe ?
- On pratique une césarienne. Elle a perdu les eaux trop tôt.
- Ah, j'me disais aussi que je pouvais pas mettre trompé de plus d'une semaine pour la date de naissance. D'ailleurs on est le combien ?
- Vendredi 13 octobre.
- Ouais bon c'est normal alors, pas que je sois superstitieux hein, mais voila quoi. Bon... à partir d'aujourd'hui vaudra pas que j'oublie le 13 octobre. Sinon, elle va m'engueuler comme c'est pas possible.
- Mais... vous ne vous inquiétez pas ? s'étonna le médecin.
- Est-ce que ça sert à quelque chose que je m'inquiète ?
- ... Non. Probablement pas...
- Bon j'arrive, d'ici, cinq minutes.
- Ok.
- Dîtes lui qu'elle me fait chier. Et que j'étais peinard en train de dormir.
- QUOI ?
- Non, je rigole ! Dîtes lui que je l'aime.

Je raccrochai, une demi-douzaine de regard curieux braqués sur moi.
- Alors ?
- Oh, Nola est en train d'accoucher.
- Il va bien là ?
- J'ai lu quelque part que lorsque l'émotion est trop forte on se détache de la situation et on prends tout à la légère. A mon avis, c'est ce qui lui arrive en ce moment.
- On dirait bien... A moins que ce ne soit la fatigue...
- Il est où Esam ? demandai-je.
- Il dort.
- ESAM ! hurlai-je. Dépêche-toi, emmène-moi à l'hosto.

Jamais je n'avais voler si vite. Le trajet qui avait duré une demi-heure la première fois, dura précisément sept minutes cette nuit du treize octobre.
Durant ces sept minutes je me mis à réaliser et à stresser. Alors pour évacuer j'éclatai de rire, un rire de psychopathe soit dit entre nous, et je chantai :
Cause weeeee are the champions, of the wooorld. ♪

Esam se posa sans délicatesse sur le parking de la clinique en écorchant seulement une dizaine de voitures.
Je sautai du coucou alors qu'il bougeait encore et je couru à travers le hall.
On m'indiqua où me rendre - aparement elle n'était plus dans son ascenseur- et je défonçai les portes battantes pour trouver Nola, sur une table d'opération, un masque sur la bouche -ils avaient enfin pus l'anéstésier. Un médecin trifouillait dans son ventre ouvert à la recherche de quelque chose. Ou de quelqu'un. Mais vu son acharnement, je pensai plutôt à un enfant qui cherchait sa peluche dans une énorme malle à jouets.
Du sang avait taché son beau T-Shirt pour femmes enceintes et elle avait les yeux fermés, comme si elle dormait, mais ses paupières étaient agitées de spasmes dus à la douleur.

- Aaah ! cria le médecin sur un ton ravi.

Il extirpa des entrailles de la mère un beau bébé tout couvert de sang qui hurlait à pleins poumons, comme s'il en voulait au monde de l'avoir sorti du ventre chaud.
Nola ouvrit les yeux, tandis les bras pour porter son bébé et le serra contre sa poitrine, heureuse d'avoir donné la vie.

- Désolée madame, dit une infirmière en lui injectant un picure dans le bras.

Nola s'endormit et la dame lui prit notre enfant des bras. Elle me vit et me le donna sans un mot.
Tandis que le médecin refermait Nola, moi, je tenais ce petit bonhomme contre moi, le berçant et murmurant :
- Mon tout petit. Tu es superbe. Tu as une maman très forte, tu le sais ça ? Tu le sais ? Je te connais depuis deux minutes et je t'aime déjà. Je t'aime, boy. Je t'aime comme j'aime ta merveilleuse mère.
Et là, dans le bloc opératoire, couvert du sang de Nola, mon bébé dans les bras, face à ma belle qui se faisait recoudre, je me mis à pleurer, de joie, de tristesse, de bonheur et d'appréhension.

J'ouvrais subitement les yeux. Encore cette chanbre d'hôpital ... Moi qui pensais l'avoir fuie en allant me promener ... Les souvenirs surgirent sans que je m'y attende et je baissais les yeux sur mon ventre toujours aussi rond. Sauf qu'il n'y avait plus personne dedans. Je soulevais le pyjama qu'on m'avait enfilé et caressais distraitement la cicatrice qui barrait mon bas ventre.
Je me souvenais vaguement de l'accouchement, la douleur omniprésente occultant tout le reste.
Sauf ... de magnifiques yeux verts qui m'avaient contemplé quelques minutes.
Dans mes maigres connaissances de la maternité, je me rappelais que la mère partageait sa chambre avec son enfant. Or, j'étais seule.
Où était mon enfant ?
Je repoussais les couvertures et me levais. Il fallait que je le retrouve. A peine dans le couloir, une infirmière se précipita vers moi.
- Mademoiselle ... Vous devez rester allongée !
Je la repoussais et me dirigeais vers l'asceuseur, qui s'ouvrit sur Alex.
- ALEX !
- Nola ? Tu dois rester allongée !
- Ils nous ont pris notre bébé, Alex ! Il faut le retrouver et partir d'ici !
- Tout va bien. Il est à l'étage inférieur, le médecin vient de vérifier son état de santé et ...
- Alors tu es aussi de leur côté ?
- Quoi ?
Je me rapprochais de lui.
- Tu vois cette fille ? lui chuchotais-je à l'oreille. C'est une infiltrée, et elle va kidnapper notre bébé.
- Euh ... je crois que je vais te raccompagner dans ta chambre.
Il sortit de l'asceuseur et j'en profitais pour appuyer sur le bouton. La porte coulissa et se referma.
Je regardais l'indicateur jusqu'à ce qu'il affiche l'étage 2, celui où mon bébé était.
La porte s'ouvrit sur l'étage de la maternité, et je pénétrais dans la pièce où tous les enfants étaient séquestrés. Je parcourais du regard la pièce, mais je ne retrouvais pas les yeux verts.
J'arrivais trop tard.
Alex arriva et me regarda comme si j'étais démente.
- Ca va ?
- Ils vont tuer notre bébé !
- Nola, il est là-bas ...
Il m'entraîna vers un berceau en verre au fond de la pièce. Le petit enfant qu'y était couché ouvrit les yeux et nous observa, intrigué.
Alex le prit délicatement et le déposa dans mes bras. Puis il entoura des siens mes épaules.
- Il a tes yeux.
- Tu vois, j'avais raison, c'est un garçon.
Comment avions-nous pu donner la vie à un être aussi beau ? Je me perdis dans ce regard émeraude, occultant tout le reste, les bras d'Alex, les gémissements des autres enfants, mon coeur qui explosait de joie et le sang qui s'échappait de ma cicatrice et allait alimenter la flaque rouge à mes pieds.

[ pour info, elle a fait une crise de démence ]

Je m'assis avec un soupir dans le siège inconfortable au chevet de Nola.
- Raaah mais t'es malade des fois, toi... râlai-je.
Je joignis mes mains sous mon menton et je souris en la regardant dormir Enfin, si la morphine faisait dormir.
- Et le pire c'est que je crois que c'est pour ça que je t'aime.

Le médecin avait été clair : si elle se levait encore, il l'attachait.
Radical, certes, mais je doutais de l'efficacité de cette technique.
Il fallait que la la blessure cicatrise, donc, interdiction de bouger. Et cela pour Nola, c'était pire que tout. Ne rien faire, ne rien voir d'autre que sa lugubre chambre d'hôpital, j'imaginais déjà sa tête quand elle apprendrait qu'elle devait rester au lit une semaine environ.
Je me levai, repoussa du bout du doigt une mèche qui lui barrait le front et l'embrassai entre les deux yeux.
Je sortis de la salle et alla chercher notre enfant. Normalement, tout allait bien pour lui et il aurait pu sortir le lendemain. Mais rien ne semblait se passer normalement dans ma vie.

Je reviens au chevet de la mère avec l'enfant dans les bras. Je le tenais serré dans mes bras et il gazouillait avec énergie en essayant de s'attraper le pied avec sa main. Lorsqu'enfin je le laissais faire il entreprit de mâchouiller ses orteils avec ses petites dents.
Nola remua et ouvrit les yeux.
Elle me découvrit et tendis la main dans ma direction. Je joignis mes doigts aux siens et je lui dit d'une voix ou je ne pu dissimuler la fierté :
- Nola, je te présente Milo.

- Alex, tu m'en veux ?
Elle était toujours sur son lit avec son enfant sur le ventre. Ce dernier dormait tranquillement, roulé en boule comme Nola avait l'habitue de de le faire.
L'anxiété brillait dans son oeil gris et je lui dit :
- Nan, bien sûr, comment pourrais-je t'en vouloir ? Je t'aime et je te promets que je serais toujours là pour te soutenir, même si tu fais des choses très très très stupides.

[ Il y a tellement de choses plus importantes que l'argent, et il faut tellement d'argent pour les acquérir ...

J'ai récupéré Vicky Cristina Barcelona ... j'avais raison, c'est un film super ! ]


- Nous avons dû pratiquer la césarienne car votre enfant ne se présentait pas dans la bonne position , vu que vous n'êtiez pas encore à terme. Les psychologues s'accordent à dire que ce type d'accouchement ne favorise pas les relations mère-enfant, et c'est en partie vrai. Mais ne vous inquiètez pas. En attendant, il vous faut un repos complet le temps que vous cicatrisiez, et que vous n'ayez pas de choc émotionnel, sinon vous pourriez refaire une crise de démence, et vous êtes encore affaiblie ...
Je tournais la tête vers Alex, qui baissa coupablement les yeux. Le médecin ajouta quelque chose, mais compris rapidement que je ne lui accordais plus aucune attention et sortit sur la pointe des pieds.
- Je suppose que tu n'as pas pris la peine de m'annoncer que je devrais rester ici ?
Ma voix monta dans les aigus, et s'acheva dans un ridicule trémolo. C'était de loin la scène de ménage que j'avais escomptée quelques secondes auparavant.
- Ben si, je voulais te le dire, mais je savais pas comment ... Et arrête de crier, tu vas réveiller Milo.
- Et combien de temps dois-je encore expier ici ?
- Arrête de dramatiser.
- Désolée.
- Quatre mois.
- QUOI ?
- Mais nan, je plaisante. Raaaaaah, t'as vraiment pas le sens de l'humour ...
- T'aurais pas une boîte d'anti-dépresseurs ?
- La situation est si dramatique ?
- Ou des calmants ?
- Bonne idée, je vais te droguer, au moins t'arrêtera un peu de t'exciter. Le médecin a dit ...
- On se fout de ce que le médecin a dit.
- Ben tu sais, un jour ce qu'il dira, ça te sauvera la vie.
- Ce jour n'est pas encore arrivé, alors appuie sur ce putain de bouton, puisque je n'ai pas le droit de bouger !
- Non. Faut te calmer.
- Justement ! J'y arriverai pas, alors appelle un médecin, dis-lui de m'assomer avec des médicaments, et je te dirais que je t'aime et que je suis la femme la plus heureuse du monde d'être la mère de ton fils plus tard.
Il se pencha et m'embrassa. Je voulus passer mes mains autour de son cou, mais je me rappelai que je tenais Milo dans mes bras.
- Ca va mieux, maintenant ?
- Mmmh ... je sais pas.
- C'est donc si difficile d'en redemander ?
Je me poussai et il s'allongea à côté de moi sur le lit d'hôpital.
- Tu ne veux pas nous enlever ?
- Il y a quelques heures, c'était l'infirmière la kidnappeuse. Je crois qu'elle est plus qualifiée que moi pour ce genre d'opération, alors ...
- Très drôle.
- Je te jure, t'es en train de devenir psychorigide.
- Je te dis que j'ai besoin de me droguer !
- Je penserai à te ramener de la moquette demain.
- Tu ne restes pas cette nuit ?
- C'est interdit.
- Alors cache-toi dans le placard.
La soirée se passa bien et je réussis à peu près à me calmer. Alex se cacha dans le placard lorsque l'infirmière apporta mon plateau-repas, et mangea la moitié de mon repas, ne me laissant qu'un quart de steak et une salade.
Finalement, il se rallongea, et je déposai Milo dans ses bras.
- Il est beau, hein ?
- Oui.
- Il a mes yeux, hein ?
- Oui.
- Par contre, il a ta bouche.
- Faudra pas que tu confondes, lui glissai-je à l'oreille.
- Aucun risque.
- Tant mieux.
- Je vais peut-être le coucher ?
- Oui.
Je caressais la joue de Milo et déposais un baiser sur son front. Alex se leva et le déposa doucement dans son berceau, le borda et revint près de moi.
Je lui fis une petite place, caressais sa joue et déposais un baiser sur son front, puis fermais les yeux. Trouver le sommeil allait être dur.
- C'est tout ?
Trouver le sommeil allait être très dur.
- Pourquoi ? grognai-je.
- Ben ... Tu es tendue, et ...
- J'allais pas te faciliter la tâche, non ?

- Si tu ne veux pas me faciliter la tâche, peut-être que tu ne veux pas tout court, remarquai-je.
Elle se tourna vers moi en s'allongeant sur le flanc.
- Je te veux toi.
Je restai sur le dos et je mis mes mains sous ma nuque en regardant le plafond.
- Cool. Alors on est d'accord.
- D'accord pour quoi ? Pour tenter mon évasion ? demanda-t-elle avec une étrange nuance dans la voix.
- Ton évasion au septième ciel ? Pourquoi pas...
Je tendis le bras et la serrai contre moi, en posant sa tête sur mon torse. Son souffle chaud traversait le coton fin de mon T-shirt.
- Let's get it starded, chuchotai-je.
- Hein ? fit-elle. T'as dit quoi ?
Je tournai la tête et ses yeux se trouvèrent tout près des miens. Je l'embrassai tendrement en posant la main sur sa hanche.
- Je n'ai rien dit.
- Si t'as dis quelque chose dit-elle en passant ses bras autour de mon cou.
- Je n'ai rien dit qui aie de l'importance.
- Tu ce que tu dis à de l'importance pour moi, rétorqua-t-elle.
- Je t'aime.
- Moi aussi.
Je lui enlevai sa blouse d'hôpital et elle entreprit de défaire ma braguette.
La nuit pouvait commencer.

Dans un coin de la pièce, un vagissement innocent retint ma main alors que dégrafai son soutient-gorge.
- C'est pas immoral ça ?
- Si complètement, répondit-elle en me déshabillant.
- J'me disait aussi...


Au petit matin, un rayon de soleil imprudent se faufila à travers le volet pour atterrir sur les yeux de Milo. Personne ne pu voir qu'à cet instant l'enfant semblait envoyé des nuages car dans la pièce où il se trouvait, tout le monde dormait profondément. Ronflait profondément pour certains même.
Alors, comme pour protester contre le manque d'attention qu'on lui portait, l'enfant se réveilla et se mit à pleurer.


Je roulai sur le côté pour arrêter ce vacarme. Je pris l'oreiller et voulus le mettre sur ma tête, mais quelque chose m'en empêchait. Je tirais alors plus fort, en disant d'une voix endormie :
- Ça va pas se passer comme ça. Ah non !
D'un coup sec, je parvins à m'en emparer mais, emporté par mon élan, je tombai du lit étroit.
Poussant un rugissement de douleur, qui ne fit qu'accentuer le bruit extérieur, j'ouvris les yeux.
Je vis une Nola étonnée et mon bébé qui chialait.
- Me dis pas qu'il va faire ça tout le temps.
- Et si...

Show me how to lie
You’re getting better all the time
And turning all against the one
Is an art that’s hard to teach
Another clever word
Sets off an unsuspecting herd
And as you get back into line
A mob jumps to their feet

Now dance, fucker, dance
Man, he never had a chance
And no one even knew
It was really only you



Tuer est un acte de communication, Bernard Werber.
Ce livre est vraiment génial !!

Look inside,
Look inside your tiny mind
Now look a bit harder
Cause we're so uninspired,
so sick and tired of all the
hatred you harbor

So you say
It's not okay to be gay
Well I think you're just evil
You're just some racist who
can't tie my laces
Your point of view is medieval

Fuck you (Fuck you)
Fuck you very, very much
Cause we hate what you do
And we hate your whole crew
So please don't stay in touch
Lily Allen

[ https://2img.net/h/i130.photobucket.com/albums/p251/witchielaguedine/Impossible%20Fascination/ForeverSeventeen-Barbie.jpg

Ca ne te dirait pas quelque chose ?
Bon Dieu, ça fait vraiment pitié. ]


J'entendais au loin un gémissement. J'enfouis ma tête sous les draps, en essayant desespérèment de revenir au monde des rêves.
Peine perdue, le vacarme que fit Alex en tombant du lit me réveilla définitivement.
- Me dit pas qu'il va faire ça tout le temps ...
- Et si ... soupirai-je.

Je m'entortillai dans le drap et me rapprochai du berceau d'où le bruit provenait. Je le pris délicatement dans mes bras et le berçai, ce qui ne fit qu'aggraver ses pleurs.
- Et merde ...
- Attends, tu sais pas t'y prendre. Donne-le moi.
Il se mit à fredonner, sans succès.
- Alors, qui sait pas s'y prendre ? relevai-je sournoisement. Je crois qu'il a faim. Et pour ça, mon vieux, tu n'es pas encore qualifié.
- Ah ouais ?
- Je n'ai jamais entendu parler d'un homme capable d'allaiter un enfant, mais bon, vu que c'est toi, ça ne m'étonnerait pas tant que ça.
- Aaaaah, dans ce sens.
- Ben ouais.

Il me redonna Milo, qui changea de bras comme une marchandise. Sauf qu'il était mille fois plus précieux.
Pendant que je le nourrissais, Alex s'assit à côté de moi.
- J'aimerai bien qu'il ai la nationalité française.
- Pour quoi faire ?
- Ce pays est formidable, mais question scolarité, ça ne vaut pas trop la France.
- Alors tu envisages de rentrer ?
- Pas dans l'immédiat. Mais quand il aura quatre ans ...
- Il vient à peine de naître.
- Faire des projets m'empêche d'angoisser.
- Je sais.
- Tu sais beaucoup de choses, si tu veux mon avis.
- Tu as déjà prévenu ta famille ?
- Non. Je le ferai demain. Et toi ?
- Pareil.

A ce moment, Cyrille, Laure, Manon et Marc entrèrent.
- Alors, il est où le martien ?
- Le petit truc vert répugnant qui bave et crie ? Dans les bras de Nola.
Tous nous félicitèrent et se penchèrent pour saluer notre rejeton.
Marc débouchonna la bouteille de champagne qu'il avait apportée, et chacun but une gorgée au goulot.

Ils partirent une demi-heure plus tard, ils avaient encore du travail.
- Tu as vraiment envie de retourner en France ?
- Peut être.
- OK.
- Quel échange merveilleux, ironisai-je.
- Ca tu peux le dire, ma vieille.
- Tu vas bosser, demain ?
- Tu veux que je restes ?
- Non, vas-y. C'est moi qui suis séquestrée, pas toi.
- Ton internement passera vite, ne t'inquiète pas.
- Oui oui ...

Le lendemain, alors que le soleil ne s'était pas encore levé, ALex nous embrassa tous deux, promit de revenir le soir, et s'apprêta à sortir.
Sur le seuil de la porte, il se retourna, et ajouta :
- Et n'essaie pas de t'évader. Sinon je débarque avec les menottes.

Bien sûr, on est en vacances après tout.
Nouveau projet, ça va déchirer un max ... !!

Ou pas =D
( Bon je supprime notre HS ^^ )
Merci =]

Je toquais contre la porte blanche de sa chambre d'hôpital.

- Entre Alex, fit sa voix à travers la cloison.
- Comment tu sais que c'est moi ?

Je baissai la clenche.

- Le flair, mon ami, le flair...
- Je sens si mauvais que ça ?
- Mais non, tu sens très bon papa.
- Ça fiche un sacré coup de vieux...
- De quoi ?
- Qu'on m'appelle papa...
- Oh, mon pauvre papa, je te plains si tu savais.
- Mais bon, c'est donnant donnant, si tu m'appelle papa, je t'appelle mamie...

Nola m'envoya son oreiller de toutes ses forces en poussant un cri de guerre.

Ah ouais. Ok d'accord. Elle le prenait comme ça. Elle allait morfler. Ça c'est moi qui vous le dit.

- A l'attaque !

Je me jettai sur elle et la plaquai sur le lit. Comme elle essayai de se débattre, je lui emprisonnai ses poignets dans une de mes mains tout en essayant de la bâillonner avec l'autre.

- Ah on me viole ! fit-elle d'une voix faussement affolée.
- Pfff... Trop facile...

Je la lâchai en rigolant et me levai, m'avançant en direction du landau qui ne quittai plus cette pièce.

Milo était en train de jouer avec un dragon vert en peluche et le faisait voler au-dessus de sa tête et émettant des bruits pour le moins étranges.

Quand il vit que je m'approchai, il arrêta son jeu et ouvrit deux grand yeux ronds, étonnés, presque effrayés.

Il se demandai sûrement quel était cette chose qui avançait vers lui, avec des yeux blancs, des tentacules de chaques côtés du visage et en sifflant des tsss, tssss, menaçant (Ce machin bizarre c'est moi, je ne fais que loucher et agiter mes mains, rassurez-vous.)
Et alors que je vis ses yeux devenir humides et son nez coulant, je me métamorfosai denouveau en humain "normal". Je le pris dans mes bras et le berçait en lui chantonnant :

- C'est bon, papa à chassé la vilain méchante bête. Tout va bien mon petiot.

Il sourit et gazouilla.
J'étais, je dois le dire, très fier de voir qu'il me reconnaissait et, me lassant porter par un sentiment de toute puissance, je le montrai du doigt en disant son prénom et puis je me désignai moi-même en disant :

- Papa. Essaye. Pa-Pa. Papa.
- Gaaa !
- Presque mais non, game over, please try again, son. Pa-paa.
- Gaa gaaa !
- OUAIS ! T'es un pro mon fils ! Le meilleur de tout les hommes en couches-culottes !
- Hum... Je ne voudrais pas gâcher ce moment innoubliable, mais j'étais en train de me demander qui était le plus immature des deux....intervint Nola.
- T'es jalouse c'est tout, dis-je en reposant mon garçon.
- Mais pas du tout.
- Menteuse. T'es jalouse.
- T'as dis quoi là ?
- Jalouse-euh. T'es jalouse-euh.
- Répète pour voir.
- Jalouuuse.
- Tssss.
- Au fait tu veux toujours qu'on se marie ?
- Ben oui. Pas toi ?

Je sortis une boîte de ma poche et l'ouvris devant ses yeux en posant un genoux à terre et en déclarant d'une voix que je voulu sollenelle :

- Veux-tu devenir ma femme ?
- Ah non !
- ... ?
- Je veux bien qu'on se marie, dit-elle, mais je refuse de devenir ta femme !
- Et ben on et mal parti là...

Je lui pris la main et enfonça sans aucune classe la bague autour de son doigt.

- Laisse moi faire, c'est pas le bon doigt.
- Et merde.
- A qui le dis-tu !
- Bon voila, c'est mieux comme ça.
- Elle est très belle.
- Comme toi.
- Je suis si ronde que ça ?
- Non, tu es aussi fine.
- Merci.
- De quoi ? De te comparer à la bague ?
- Non, de me l'avoir offerte.
- De rien ma belle.
- Je t'aime.
- Cool !

Elle me balança son oreiller dans la tête une nouvelle fois.
Que du bonheur.

[ http://vids.myspace.com/index.cfmfuseaction=vids.individual&videoid=62092784
Celui-là en vaut le coup - pour une fois-. ]

Maybe there's a God above
And all I ever learned from love
Was how to shoot at someone who outdrew you
It's not a cry you can hear at night
It's not somebody who's seen the light
It's a cold and it's a broken hallelujah

(Hallelujah, Rufus Wainwright)

When the world's gone crazy, and it makes no sense
And there's only one voice that comes to your defence
And the jury's out
And your eyes search the room
One friendly face is all you need to see
And if there's one guy, just one guy
Who'd lay down his life for you and die

I hate to say it
I hate to say it
But it's probably me


It's probably me, Sting & Eric Clapton.

Je lui dirai qu'il est né de l'amour
Que nous l'attendions passionnément
Que chaque nuit s'efface au nouveau jour
Qu'il sera grand mais qu'il a bien le temps
Oh Dieu qu'il a bien le temps

Et que la vie l'appelle que le monde l'attend
Que la terre est si belle et le ciel est si grand

Je lui dirai qu'ici bas tout s'apprend
Le bien le mal et même le bonheur
Qu'il ne perde jamais ses yeux d'enfant
Devant trop de malheurs et de laideur
Qu'il regarde avec son coeur

Je lui dirai d'être sage et prudent
D'aller frôler les glaces et les feux

Je lui dirai les chansons les poèmes
Qu'il n'y a pas d'amour sans histoire
Que le bonheur est un grain que l'on sème
Qu'amour et santé ne s'achètent pas
Et qu'on n'est riche que de ça

J'interrompis mon fredonnement quand Alex plissa les yeux. Comme Milo dormait et que son sommeil était des plus légers, je lui envoyai un regard du genre "quoi ?".
Il fit mine de se trancher la gorge en révulsant ses yeux.
- Tu chantes faux, murmura-t-il, finalement.
- Alors vas-y, toi.
- Rhaaaaaa, te fâche pas ...
- Je ne suis pas fâchée.
- Alors pourquoi tu fais la gueule ?
- C'est pas toi qui est enfermé avec pour seul décor un tableau abstrait et en passant, moche.
- Tu ne connais rien à l'art.
- Toi non plus. Mais il est quand même moche. Comment se passe la mission ?
- Bien. Il y a beaucoup de boulot.
J'hésitai à lui dire la maladie de Cyrille. C'était son ami, après tout, il avait le droit de savoir. Mais Cyrille avait le droit que les autres ne sachent pas non plus. Mais si Alex savait que je le savais ?
Il l'apprendrait tôt au tard, alors où le problème ?
- Cyrille a un cancer.
- Comment tu le sais ?
- Il me l'a dit. C'était sensé être un secret, alors ne va pas fanfaroner.
- T'inquiète. Il t'a dit autre chose ?
- C'est sa dernière mission, après il se retire.
- Et merde ...
Il s'assit sur le lit, ramena ses jambes contre son torse et posa sa tête sur ses genoux.
De la main qui ne tenait pas Milo, je caressai ses cheveux.

- Tu crois que Laura est au courant ?
- Aucune idée.

Comme chaque soir depuis quatre jours, il resta dormir dans la petite chambre d'hôpital et partit avant que le soleil daigne se lever.

Et maintenant que le conte touchait à sa fin, que le prince et la princesse étaient heureux et qu'ils avaient beaucoup d'enfants, qu'allait-il se passer ?
Une longue vie ?

Maintenant que j'avais lâché le morceau, le cancer de Cyrille plombait mon cerveau et parasitait chacune de mes pensées.
A quoi bon, finalement ?
Si la vie tenait à si peu, si la mort nous enlevait ceux à qui nous tenions le plus en laissant nos ennemis intacts, pourquoi se battre ?
Elle rôdait à chaque coin de rue, prête à vous passer le couteau sous la gorge ...
Instinctivement, je raffermis ma prise autour de Milo. Le monde ne lui ferait peut être aucun cadeau. Il devrait se tailler un chemin, une vie, et renoncerait plus d'une fois.

La terre était belle, encore un peu préservée de la folie des hommes, mais pour combien de temps ?
Combien de temps avant qu'une guerre n'éclate ?
Qu'un kamikaze se fasse sauter la cervelle pour une gloire dont personne ne la lui reconnaîtrait ?
Combien de temps avant que les océans nous submergent ?
Combien de temps avant que les savants découvrent une arme biologique parfaite, anéantissant la galaxie ?
Combien de temps ?

Le revers du bonheur. On s'y prenait, puis en rouvrant les yeux après un magnifique rêve, on s'apercevait que tout n'était pas si rose.
Et alors on se cramponnait à sa montre, on programmmait son réveil, et on se répétait inlassablement : " Pas le temps. Vivre. Faire quelque chose, ne pas rester sans rien faire."

Nous raccrochions nos vies entières à la seule idée de la mort. Impossible de l'occulter.
Etait-ce pour cela que les grandes découvertes avaient été réalisées ? Parce que l'homme voulait laisser sa trace derrière lui ?
Ne pas être oublier, vivre au-delà de la mort, même au travers de quelques lignes et dans l'explosion d'une bombe nucléaire ?

La solution n'était peut être pas si compliquée.
Tout détruire et recommencer. Mais à quel prix ? Pour quelle raison ?


Je ne vis pas les heures passer, et quand Alex revint, il faisait déjà nuit.
- Tu broies du noir ? plaisanta-t-il en voyant ma figure.
- Quand on a rien de mieux à faire ...
- Il te reste deux jours. C'est pas si long, non ?
- Oui. Bonne journée ?
- Oui. Et toi ?
- Géniale.
- Quel entrain.
- Tu m'as manqué.
- Toi aussi.

A quoi bon ?
Pour Lui. Simplement.

[ https://www.youtube.com/watch?v=B24ngkTrsTI
Surtout pour la chanson, la vidéo est plutôt douteuse ...

- j'ai édité le mariage, mes deux premiers posts. Ca va beaucoup mieux maintenant ! ]

[