Nos premiers

Je mettai le contact et attachai ma ceinture. La journée était enfin achevée, et le week-end serait pour demain soir.
Ils m'avaient vraiment tapé sur les nerfs, aujourd'hui. Certes, j'avais un peu baclé mes derniers plans, mais c'était ces putains de clients ! Des gouttières ascenseur ? Et puis quoi encore ?
Je leur avais bien dit qu'ils ne pourraient pas dormir les soirs de pluie, mais ces crétins s'entêtaient. Alors construisez votre maison seuls et bouchez vos oreilles avec du persil pour ne pas entendre les mises en garde de ceux qui savent de quoi ils parlent.

Je regardai l'heure. 19h05. J'étais dans les temps.


Je garai la voiture devant la maison, bijou d'architecture comtemporaine. Ma plus belle oeuvre, de toute ma carrière.
Les gens ouvraient la bouche en passant devant, et je nettoyai la bave sur le paillasson chaque matin.
Chacun ses goûts.
Elle partageait les miens, alors les autres pouvaient penser ce qu'ils voulaient, je n'en avais rien à cirer. Du moment qu'elle m'aimait.


Je poussai la porte.
- Chérie ? Met ton manteau, ce soir je t'enlève !
Pas de réponse.
- Chérie ? C'est moi ! J'ai réservé au restaurant, pour nos quatre mois de mariage ! Tu vois, j'ai pas oublié !

Je regardai ma montre. 19h19.

Je montai les marches deux à deux, et entrai dans notre chambre à coucher.
Elle était assise en tailleur sur le lit, qui odulait au rythme de ses sanglots.
Elle me vit, et se ressaisit, essuya prestemment son mascara coulant, et glissa une mèche blondasse derrière son oreille.
- Avril, qu'est-ce qui se passe ?
- Tu as le culot de me demander ? m'hurla-t-elle à la figure.
- Tu ne veux pas aller au restaurant ? Je peux cuisiner ici, si tu préfères ...
- Mais tu ne comprends rien à rien !

Elle tira de la poche d'un de mes pantalons, que j'avais mis au sale hier soir, une carte avec au dos un numéro griffoné.
Puis mon portable, avec une ribambelle de textos.

- Si c'était une femme, j'aurais pu comprendre ! J'aurais peut être même pu te pardonner ! Mais un homme ! Comment est-ce que tu as pu me faire ça ? Qu'est-ce que je n'ai pas, pour que tu ailles le chercher chez une ... chez un autre ?

Je me levai et ouvris son placard en commençant à arracher ses fringues des cintres.
- Tu disais que notre amour c'était tout pour toi !
- Mais c'est vr... commença Michaël.
- MAIS TA GUEULE ! hurlai-je.

Je me mis à pleurer comme une madeleine en crachant tous ces mots qui m'empoisonnaient.

- Je croyais que tu étais sincère... Que lorsque tu me disais "Je t'aime" tu le pensais vraiment.... Que lorsque tu me faisais l'amour en me caressant... tu... tu ne pensais qu'à moi... Que... Que le mariage était... je sais pas moi ! Une sorte d'apogée de l'expression mutuelle de nos sentiment !
- T'as trouvé ça où ? Dans Jeune et Jolie ? lança-t-il avec haine.

Ma main partie toute seule.

En plein dans son visage. Lancée avec tout l'amour que j'avais pour lui.

Maintenant j'étais tout à fait calme. A l'extérieur du moins, car à l'intérieur, je bouillonnais.

- Très bien. Tu aimes un homme. Tu trompes ta femme avec un homme. Tu me trompes. Tu me mens. Tu as tissé notre idylle sur des mensonges. Tu...
- Je ne t'ai jamais menti, coupa-t-il.
- AH BON ? Comment oses-tu me dire ça ? m'écriai-je.
- Écoute moi.
- Non.
- Écoute moi Avril. Écoute moi si tu m'a aimé ne serait-ce qu'un instant.

Je continuai de faire sa valise en roulant en boule tous ces habits.

Si je l'avais aimé un seul instant ? Je l'ai aimé depuis le premier jour. Je suis tombée amoureuse de ses yeux gris, de ses cheveux en bataille, de ses manies à la con, ses expressions pourries. J'étais raide dingue de lui. Et dire que...

Comme je ne disais rien, il m'expliqua, calmement, posément, son opinion.

- Je t'aime Avril. Je ne peux le nier. Je donnerai ma vie pour toi. Je mourrai pour toi. Tu es le soleil qui éclaire mon existence. Tes yeux sont les étoiles de mes nuits. Sans toi... je me dé-sècherai comme un lac dans la Death Valley.
Il reprit son souffle.

- Mais tu sais, l'amour ne se contrôle pas. J'aime aussi un homme. Il est comme mon frère, mon ami, mon confident. Ce n'est pas pareil. C'est différent. Ni mieux ni moins bien. Juste différent. Tu comprends ?


- Non.

Sans d'autres paroles, elle me fourra la valise dans les bras.

- Va-t-en.
- Je t'aime, Avril !
- Ce n'est pas une excuse ! Pars avant que je te fasse dégager à coups de pieds au cul !
- Alors c'est fini ?
- J'ai besoin d'être seule ! Mais tu ne peux pas comprendre ça, suis-je bête ! Pour ne pas t'emmerder dans ta vie, tu as pris deux concubins ! La vie n'est plus à la polygamie !

J'avançai ma main pour caresser sa joue, elle me repoussa violemmment et croisa ses bras sur sa poitrine.
Je sortai à reculons de la pièce, essayant de graver son visage dans mon esprit.
Ce n'était certainement pas le moment, mais j'avais une folle envie de lui faire l'amour. Pourquoi mon désir était-il attisé dans ces moments de rupture ?


J'allai chez David. Il était l'autre exacte moitié de ma vie. Chez David, plutôt chez nous. Nous avions bâti une vraie vie dans notre appartement spartiate mais confortable.
Je ne pouvais pas les départager. Mon coeur était scindé en deux parties aussi exactes qu'inséparables. Sans les deux, je n'étais plus rien. Tout ou rien.

Je sonnai.
- Michaël ?
- Surprise ! lançai-je sans conviction. On a perdu le client et le dossier. Le concurrent a été plus intelligent que nous et nous a pris à revers.
- Je suis désolé, Micky.
- Tu me laisses entrer ?
- Euh ...
- Quoi ? Y a une fille à moitié nue dans la chambre ?
- Un film porno.
- Rho putain.
- Attends là. Je vais éteindre. Désolé, je sais que t'aime pas ça.
- Mais pourquoi tu regardes ces cochonneries, David ?
- Je suis seul toute la semaine pendant que tu joues le patron à deux cent bornes d'ici. Faut bien que je me remette en forme pour le week-end.
- Va au gay-parties.
- Je t'aime, Micky. Je pourrai jamais te tromper.
J'allai me réfugier dans ses bras.
- Fait pas la gueule, c'est qu'un client. T'en trouvera d'autres.
- Ils ne seront pas aussi géniaux.
- Mais s'ils sont géniaux, pourquoi ils ont changé de boîte ?
- Ils ont découvert le secret.
- Ah merde. C'est quoi le secret ?
- J'ai pas le droit de te le dire.
- Bon, je vais préparer le repas, lui dis-je.


Alors que je récuperais les quelques pâtes qui n'avaient pas cramé, le téléphone sonna. David décrocha.

- Allô ? Oui ... il est juste à côté de moi. Vous êtes ?
Il posa sa main sur le combiné.
- Tu connais une certaine Avril ? Elle porte le même nom que toi.

- Mademoiselle ? Je vous le passe ? Ah bon ? Je vous écoute ...

Je savais exactement ce qu'Avril lui disait. J'aurais voulu arracher le téléphone des mains de David, mais j'étais tétanisé.
Je savais que j'étais désormais face à l'intersection.
Je n'avais plus d'alternative.
Je devais assumer.
Choisir.

Après son départ je me fis violence pour ne pas fondre en sanglots. Allez, du nerf soldat ! Reformez le bataillon ! Vous avez perdu cette bataille mais pas encore la guerre. Ne baissez pas les bras. Ne baissez jamais les bras.

Je me mis en mouvement. Un pied devant l'autre. Ne pas réfléchir. Un pied. L'autre. Lever le bras. Ouvrir le placard. Sortir la boîte. La tasse. Le lait. Faire chauffer. Ne pas se brûler. Se foutre sous la couette. Avaler une gorgée. Une autre. Laisser le liquide agir. Ne pas sentir sa langue brûlé qui irrite. Admirer les pouvoirs magiques d'un chocolat chaud.

J'allumai la télé et je me défoulai sur la zapette. Pub. Jeu. Pub. Info. Série. Talk-show. Pub. Film. Rien de bien. Je choisis un DVD de l'armoire. Je pris le seul film que j'aimai qui n'étais pas une histoire d'amour à l'eau de rose, je n'avais pas envie de me dégoûter encore plus.

"Je me ris du danger !" Mais oui Simba, on sait. Et c'est pour ça que tu vas partir en courant lorsque les hyènes vont débarquer. Voila. Parfait. Cours, évite le squelette du dinausore, n'oublie pas Nala qui te suis et qui après se moquera de toi en t'imitant "Haha ! Je me ris du danger." Allez, ne t'inquiète pas, ton père, le grand roi Musafa va venir vous sauver. N'aie pas peur. Voila, papa débarque. Il te gronde, évidem...

Allez, je vous épargne la suite. Que voulez vous ! A force de regarder le Roi Lion à chaque chocolat chaud, on commence à le connaître par cœur...

Mickaël déteste quand tu regardes les Walt Disney.
Cette pensée, je l'ai regretté à l'instant même où je la formulée.
Mickaël déteste les Walt Disney. Il a toujours dit qu'il fallait que j'arrête de me prendre pour une gamine. Et puis quoi encore ? Il fallait que j'attende d'avoir un enfant pour pouvoir regarder de nouveau mon film préféré ? Pfff... N'importe quoi !
Mickaël...
L'amour de ma vie...
L'amour de ma vie ?
L'amour de ma vie.
Et merde.

Je décrochai le téléphone et composai le papier qui se trouvait sur le numéro. Nan. L'inverse. Souffler un bon coup. Ne pas s'embrouiller.
- Ouii ?
Zut...
Même pas la voix de tapette à laquelle je m'attendais. Une voix assez virile même.
Je suis conne, oh mon dieu que je suis conne ! A bas les préjugés ! Tous les gays ne sont pas des tapettes.

- Bonjour. Hum... Je m'appelle Avril Drew. Est-ce que Mickaël est là ? Non, merci, je ne veux pas lui parler. Hum... Est-ce que vous... vous aim... vous êtes David ?
- Oui.
- Est-ce que vous êtes gay ?
Mais, qu'est ce que je raconte moi ?
- Heu... Non ! Je m'en fiche... je... Je m'embrouille...
- C'est pas grave.
Je l'entends sourire à l'autre bout du fil.
- Que puis-je pour vous ?
- Me renseigner.
- A propos de quoi ?
- Et bien...
Je repris mon souffle.
- Est-ce que vous aimez mon mari ?
C'est vachement flippant de formuler cette phrase à voix haute. J'ai eu l'impression que toutes mes certitudes volaient en éclat. Ce qui était probablement le cas. Mais passons...
- Heu... hésita David qui commençait à être largué. Votre mari ? Mais... qui est votre mari ?
- Ben... (Sexy j'avoue, mais sa question ma prise au dépourvue.) Mickaël.
- Mickaël quoi ?
- Ben Mickaël Drew.
- Nan... qu'est ce qu'il y a avec Micky ?
Micky.
Le salaud.
Il avait toujours refusé que je le surnomme comme ça. Il trouvait que ça faisait puceau. Me demandez pas pourquoi.
- A vous dire le vrai, Mickaël Drew et moi-même sommes marié depuis quatre mois. Et nous vivons, pardon, vivions ensemble depuis trois ans.
( Blanc. )
( Blanc. )
( Blanc. )
( Rouge. Coleur de la culpabilité. Avais-je le droit de briser c'est certitudes à lui ? Lui que je ne connaissait pas. )
- Il ne m'avait jamais dit qu'il aimait aussi les femmes.
- ... ?
- Arpès tout ça ne me gène pas qu'il soit bisexuel, ni qu'il vive avec une femme. Je l'aime comme il est. Pas vous ?

Je raccrochai.

Mais quelle conne mais quelle conne mais quelle conne...

- Alors ... articulai-je difficilement, ça ne te dérange ... pas ?
- Que tu sois bi, j'en ai rien à foutre.
- Putain, David, merci. Qu'est-ce que ça fait du bien d'être compris, tu peux pas savoir ...
J'avançai ma main. Il la prit et la reposa doucement contre mon corps.
- Par contre, que tu m'aies menti pendant ces dernières années, je ne m'en fiche pas. Dans un couple gay, tu vois, la fidélité, c'est tout aussi important. Je croyai que tu étais sincère quand tu manifestais avec nous, quand tu m'embrassais, quand tu me disais que j'étais le mec de ta vie ...
- Mais j'étais sincère ! Tu es une moitié inséparable de ma vie, je ne peux te départager avec Avril !
- Je suis désolé, Micky. Mais il faut que tu choisisses. Et crois-moi, qu'importe sera ton choix, je resterai en communication avec ta ... femme, pour vérifier que tu ne reprends pas tes vieilles habitudes.
- David ... Tu ne peux pas me demander ça.
- Pourquoi ? Parce que tu feras de la peine à un de nous deux ? Mais c'est inévitable, Micky ! Tu m'as reproché tant de fois de n'être qu'un gamin, mais tu ne vaux pas mieux ! Tu ne peux pas tout avoir, tu ne peux pas bafouer l'honneur de chacun de tes concubins pour satisfaire ton désir !
- Je ... je ...
- Va dormir à l'hôtel.

A l'instar d'Avril, il croisa ses bras sur sa poitrine.
Alors que je franchissai la porte, il posa sa main sur mon épaule.
- Je ne t'en veux pas trop. Je veux juste que tu arrêtes de me mentir. Et, une dernière question ... C'est comment, de faire l'amour avec une femme ?
- Galactique.
- ... mieux qu'avec moi ?

J'éclatai de rire, la réaction la moins apropriée à la situation, puis entrai dans l'ascenseur. Alors que les portes se refermaient, je crus voir une larme couler le long de sa joue.

Dehors, j'allumai mon portable.
Décroche, décroche, décroche ...

- Avril ! Je t'en prie, ne raccroche pas ! Je t'en supplie, écoute-moi. Je t'aperçois encore marcher sur la plage, tu ne représentes déjà presque plus rien. Y a rien à dire, rien à faire. Juste à attendre, un jour nous irons mieux ...
- Alors pourquoi tu m'appelles, Mickaël ?
- Je voulais entendre ta voix.
- Alors maintenant que c'est fait, bonne nuit.
- Avril ! Je t'aime !
- Je veux tout ton amour, Micky, je ne veux pas partager avec ce David. J'avais remarqué que tu pensais souvent à autre chose, que la nuit tu te retournai souvent, que lorsque qu'on dînait en tête-à-tête, tu t'absentais aux toilettes avec ton portable ... Je croyais que c'était seulement de stupides manies ! Et le pire, c'est que si tu avais été plus prudent, je ne l'aurais jamais découvert ! Tu nous aurais menti toute ta vie, et à l'heure qu'il est, je serais en train de m'endormir contre toi !
- Ce n'est pas encore trop tard.
- Mais est-ce que tu seras sincère ? Est-ce que tu le feras pour seulement ne pas finir seul ?
- Si je te choisissais, est-ce que tu m'aimerais jusqu'à la mort ?
- Tu veux des garanties, maintenant ?
- Je veux choisir la bonne personne.
- Tu ne veux pas finir seul, c'est tout.
- Et toi, Avril, qu'est-ce que tu veux ? Est-ce que tu me veux encore, moi ?

Long silence. Avec en fond le générique du Roi Lion.

- Un enfant de toi.
Je faillis m'étouffer.
- Avril ? C'est bien toi ?
- Ca m'est venu brusquement, comme ça. Et même si je ne veux peut être plus vivre avec toi, je sais que le seul enfant que je pourrais porter sera de toi.
- Ca revient à une déclaration d'amour ?
- Interprète ça comme tu veux ...

Elle raccrocha.
L'avais-je comprise ?
Ou pas ?

Je retournai à la maison, presque en courant. Arrivé sur le seuil, la porte s'ouvrit comme par magie.

C'était elle.
Y avait-il encore un doute ?

Nos lèvres s'effleurèrent doucement, tendrement, avant un échange fougueux, avant une vague de désir incontrôlable, avant la communion et la symbiose parfaite de deux esprits unis.
Nous étions comme à notre premier rendez-vous.
Fous et insouciants.

Mais le matin se lèverait.
Et je ne voulais pas entendre son opinion.
Jamais.
Mais il le fallait. Ainsi va la vie ...

[ Leur sort est entre tes mains.
A toi de conclure ...
(L) ]

- J'ai l'impression que cette nuit était la première. Ou la dernière. Je ne sais pas. Je ne sais plus. Je ne veux plus savoir.

Mon époux se tourna entre les draps et ouvrit les yeux avec difficulté. Il cligna des paupières devant l'intensité de la lumière et me regarda dans les yeux.
Je m'étais assise sur le matelas, le dos contre la tête de lit, les bras autour des genoux.
Je ne dis rien d'autre mais je fis un léger mouvement de tête, qui entraîna ma tignasse de cheveux délavés, comme pour demander "Alors ?".

Alors, Michaël se roula sur le dos, s'étira, posa un bras sur son visage, de façon à recouvrir ses deux yeux et il soupira.
Alors, il soupira et resta dans cette position quelques minutes.
Alors, il prit conscience que sa décision allait briser une vie et briser son cœur.

- Tu sais, commença-t-il doucement, cette nuit, je ne l'ai pas passé avec toi par dépit. Je t'aime et c'est toi que j'ai épousé. Je me suis marié et pas paxé.

Je savais que ces mots lui coûtaient beaucoup car j'avais bien compris que ce David, et bien... il l'aimait sincèrement aussi.
Mais il devait faire un choix.
J'acceptai de lui pardonner ses mensonges uniquement s'il me jurait de n'aimer aucune et aucun autre que moi.
Je sais.
Je suis égoïste.
Et alors ?

- Cette nuit avec toi a été fantastique, comme toutes les autres. Mais je sais que si je continue à vivre avec toi, je culpabiliserai par rapport à David. Et je ne veux pas vivre avec lui car cela te causerait beaucoup trop de peine.

Je me taisais toujours mais mes yeux hurlaient "Et donc ??"

- Je t'aime et je pense sincèrement que tu es la femme de ma vie.

Mais ?

- Mais je pense que pour le bien de nous trois, de toi, de David et de moi, il vaut mieux que je parte.

( Noir complet. )



Il fit ses bagages sous mes yeux ébahis, m'embrassa sur le front, posa ses clefs sur la table de la cuisine, mit ses chaussures, me regarda une dernière fois et murmura :
- Je suis désolé. Je ne voulais pas que cela finisse comme ça. Tu ne me verras plus. Refais ta vie, c'est tout ce que je te demande. Oublies-moi. Les mensonges et les non-dit ne mènent nul part, si ce n'est dans des impasses.
Il poussa la porte et j'entendis encore un "Désolé" avant que sa vie et la mienne se dissocient.

Je m'appuyai contre le mur et me laissai glisser jusqu'au sol.
Le téléphone sonna et j'eus à peine la force de décrocher, espérant que ce soit lui me disant "T'y a cru hein ?"

Une voix masculine et plutôt virile me demanda :
- Alors ?

Je raccrochai et me mis à pleurer.

Mais quels cons nous étions de ne pas nous satisfaire du bonheur lorsqu'il est à portée de main...
Timon avait raison "Hakuna Mattata", fallait le dire au présent, pas au passé.
Mais quel con.
Mais quelle conne.
Mais quels cons.

Et tout ça à quoi bon ?